A not so new world - LIBRE

- A - Ao est arrivé ici avant la catastrophe qui a dévasté l’île. Il l’a vu agir et s’est réfugié où il pouvait, attendant que la tempête ne passe. C’était terrible. Ça avait été terrible. Le volcan s’était soudainement mis à gronder et à exploser. Le mâle noir avant pris les jambes à son cou, fuyant le plus loin possible. Mais quand il était revenu, c’était comme si tout avait était brulé et par autre endroit, comme si quelqu’un, ou quelque chose était venu le ravager de son propre chef. Il avait erré, ça et là, et avait pris ses jambes à son cou à nouveau en entendant des cris de singes. Glaçant, menaçant, comme un appel à ne pas revenir, une menace funeste qui n’annonçait que la mort. Ça et les têtes d’animaux sur la plage. Il avait failli vomir en voyant tout ça.

Finalement, il s’était réfugié dans la seule terre qu’il avait trouvé accueillante en revannant, la plaine illuminée. Ici, il avait pris le temps de manger, et de se reposer. Tout en constatant qu’il n’avait croisé personne. Seraient-ils tous morts ? Avaient-ils tous fuit en voyant le volcan ou les singes prendre possession de l’ïle ? Ou bien tous avaient-ils disparu avant la déchéance ? Il n’avait aucune réponse et, d’ailleurs le mâle n’y pensa pas longtemps, il se mit à trottiner la queue en panache. « Me voilà roi d’un royaume sans sujet. Mais quel ennui mortel ! » lâchat-t-il, scrutant l’horizon avec espoir.

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]

La catastrophe est passée, laissant derrière elle la ruine d'une île qui, fut un temps, était bien belle. 

Les ressources se font maigres, les habitants s'en vont, la faune a décidé de n'en faire qu'à sa tête, et Ace a l'impression d'avoir pris dix ans en l'espace de quelques mois. Il se demande parfois, dans un élan de stupidité, si Fifa avait prédit le carnage, et disparu avec sa famille sans trace ni adieu pour cette même raison. L'idée est ridicule, mais il aime à penser que sa meilleure amie avait une excuse valable pour s'évaporer comme elle l'a fait. On ne peut pas le blâmer pour sa solitude. Qui va donc bien pouvoir lui dire d'arrêter?

Ses pensées sont coupées courtes par la faim, un problème qu'il sait pouvoir régler en allant à un endroit adapté. La Plaine paraît presque intouchable, impossible à déranger malgré les maux du monde qui l'entoure. Il l'envie, slalomant entre les arbres pour atteindre les parties vastes et pleines d'herbe.

Ace aime souvent à penser que la tranquillité lui viendra un jour; qu'il pourra vivre sa vie en paix, bien entouré et sans devoir reconstruire sa maison. Mais la vie a d'autres plans pour lui, semblerait-il. Il voit certes la fin des arbres et le début de la plaine, mais il aperçoit aussi un inconnu qui se balade comme s'il était propriétaire des lieux.

Comble de tout, ce cheval— qui se parle tout seul— se considère manifestement comme un roi. L'illusion des grandeurs n'a donc pas de limite.

Ace s'avance assez pour sortir de l'ombre, et n'a pas le temps de se retenir avant d'héler la noiraude qui se pavane en feignant l'ennui à voix haute.

« Un royaume sans sujets n'est plus un royaume, dit-il calmement, tête penchée, cela fait donc de vous un roi sans royaume. L'ennui mortel en question ne serait-il donc pas vous? »

Well. Il n'a jamais prétendu être sympathique.

- A - Aodhagan continue de parcourir les terres, la queue en panache, ne se souciant guère de qui pouvait le voir. Il ne se souciait, de toute façon, de peu de chose en apparence. Il paraissait heureux comme ça. Il n’était peut-être roi de rien, mais il était maitre de lui-même, ce qui lui donnait l’opportunité d’être ce qu’il voulait, comme il le voulait. Le regard des autres roulait sur lui comme la pluie sur son poil lustré. A quoi bon se soucier de l’avis dans autres ? On ne vit pas à travers leurs yeux. Seul son avis de lui sur lui comptait. Alors, quand un cheval pie arrive devant lui. Lui annonçant qu’il serait son propre ennui mortel, le noir reste de marbre, agitant simplement les oreilles. « Toi dans mon royaume, ça me fait donc un sujet. Donc l’ennui mortel n’est plus d’actualité ? N’est-ce pas ? » souligne-t-il avec un franc sourire sur les lèvres.

Le mâle est loin d’avoir pris ça comme une pique, ni même d’avoir vu l’étalon comme une menace, il était, à ses yeux une simple poupée dans son royaume imaginaire. Finalement il ajoute aussi calmement « Mon royaume est bien là où je le décide. Je peux être roi de moi-même et cela me suffirait bien. » Il se permet même de rire en balayant finalement les propos du mâle, qui ne l’intéressait guère plus. Il le toisa, trottinant autour de lui, curieux de voir ce nouvel arrivant. « Etiez-vous là lors de la catastrophe ? Sont-ils tous mort ici ? » Il se posait sincèrement la question après être passé dans des endroit plus glauque les uns que les autres, notamment en passant sur des ossements. Inutile de dire qu’il ne s’était pas arrêté pour demander son chemin. « Peut-être devrions nous signer un traiter de paix avec les singes. »

Il vivait totalement dans son imaginaire. Voyait-il le pie comme un simple sujet ? Absolument. Cela changerait-il un jour ? Certainement pas.

Ace apprécie peu les chevaux avec un ego disproportionné. Il a eu affaire à plusieurs du type, et aucun d’eux ne s’est retrouvé placé dans sa liste d’amis. L’inconnu en face de lui dispose d’une estime de soi haute comme une montagne, mais le pie peut tout de même admirer le culot qu’il faut pour rebondir et lui rendre la monnaie de sa pièce. Fort heureusement, Ace ne compte pas être un sujet de ce royaume imaginaire que le pangaré s’est construit: dominants ou pas, il est un Orphelin jusqu’au bout et il compte bien reconstruire les territoires qui l’ont accueilli pendant des années.

« Malheureusement pour vous, j’appartiens déjà à un autre royaume, lâche-t-il simplement. J’ai bien peur que vous ne deviez rester seul dans celui-ci. »

Son interlocuteur doit être encore jeune et idiot, si on en croit la vitesse avec laquelle il change de sujet et d’intérêts. Il lui faut un quart de seconde pour paraître totalement indifférent, et Ace le laisse lui tourner autour en levant les yeux au ciel. (Il songe à faire une remarque déplacée, mais il se retient.)

Parler de l’éruption du volcan est un sujet un peu plus intéressant, mais la direction macabre que prend directement la discussion est peu accueillante.

« J’étais là. Morts peut-être pas tous, mais beaucoup sont probablement partis. Je crains que tout le monde ne soit pas aussi disposé à rester sur une île en ruine envahie par les singes. »

L’autre étalon réfléchit à voix haute, et sa remarque est tellement ridicule qu’Ace ne peut s’empêcher de lâcher un HA sec.

« A vous l’honneur! Pour ma part j’ai assez d’expérience avec eux pour vouloir en rester loin, très loin. »

- A - Ao n’a aucune idée des territoires qui étaient présent avant. Et, quand même il en aurait eu vent, en n’en aurait rien à faire. Il n’est pas là pour être le sujet que quelqu’un d’autre. Non. Il est un roi. Dans sa tête, oui, mais quelque part, il fera tout pour y parvenir. Avec ou sans ce pie. De toute façon, il n’a pas l’air de confiance. Et il se fiche bien de lui. Il ne veut pas en être ? Soit. Le pangaré trouverait bien une autre personne. Puis une autre. Il prendrait le temps qu’il faut pour y parvenir de toute façon. Il n’était pas pressé, loin de là. Mais il tiqua quand même quand il parla de royaume. Il était curieux.

« Vous appartenez à un royaume ? demande-t-il, intrigué et un peu contrit. Sont-ils nombreux ? Je n’ai croisé personne à part vous, ce serait étonnant ? »

Aodhagan garde en tête seulement les sujets qui l’intéressent et ici, il ne semblait pour avoir le moindre intérêt. Ou peut-être que si, mais il y reviendrait plus tard. Il secoua doucement la tête doucement, mais l’éruption du volcan et surtout ce qu’il s’est passé ensuite l’intéresse. Il reste un nouveau venu. Il arrête de lui tourner autour pour simplement se placer en face de lui.

« Je suis venu avant puis je suis reparti en voyant le volcan gronder, j’ai attendu que ça passe. Quant aux singes, c’est une véritable plaie. J’ai cru en voir manger des restes d’animaux, j’ai pas oser en voir plus. » soupire-t-il.

Il semble se montrer plus sérieux qu’au début. Ao s’adapte. Change de masque en prend un autre. Il n’est pas là pour se faire mal voir. Il rire s’échappe de ses lèvres, hochant la tête.

« Il va bien falloir faire quelque chose, sinon, l’île va devenir invivable. Et je ne trouverais pas de sujet pour mon royaume ! Ce qui serait malheureux. Je ne suis pas ici pour faire de la figuration. »

Mais Aodhagan reste Aodhagan, difficile de le changer. Il soupire doucement et songe à toutes les possibilités que regorge cette île, presque vierge.

L’étalon inconnu a l’air passablement ennuyé, ce qui n’est pas forcément étonnant mais un peu vexant. Ace peut cependant admettre qu’ils ne font pas une paire de futurs meilleurs amis, d’autant plus que le pangaré lui fait penser à un chiot, se lassant des sujets de conversation comme d’un jouet en plastique.

Il peut presque voir ses oreilles se tendre à la mention des anciens territoires, et son comportement arrache presque un sourire au pie. Qui donc passe tant de temps obsédé par l’idée de royaumes? Quelle mouche l’a donc piqué pour qu’il ne soit intéressé que par lui-même et son statut hiérarchique?

« Les trois ‘royaumes’ ont été quelque peu dévastés par la catastrophe, malheureusement. Va savoir ce qu’il est arrivé aux dominants, répond-il seulement. Ah, peut-être suis-je le seul autre individu vivant sur l’île, qui sait? Il n’y a que les meilleurs qui survivent, après tout. »

Ace semble soudainement (pour une raison obscure) avoir l’attention de son interlocuteur, ce à quoi il ne s’attendait pas. Qu’importe, il peut rouler sur cette vague; il n’a pas encore été rendre visite aux primates de l’île, et il manque manifestement quelque chose si les singes sont devenus violemment omnivores. Des cadavres, vraiment?

« Les singes se rapprochent beaucoup des humains en ce sens, et leur agressivité n’est qu’augmentée par la taille de leur territoire. Ils se contentaient d’une forêt, avant que l’île ne soit brûlée au premier degré, mais on ne peut pas leur en vouloir d’avoir sauté sur l’opportunité d’agrandir leur royaume... »

Ace fouaille de la queue, fait un pas en avant et observe calmement l’individu sans nom. Il est bien construit, relativement puissant bien que manifestement peu entraîné à se bagarrer; il est du type à aboyer plus qu’à mordre, mais il ferait bien l’affaire en tant que soldat.

« Réunissez des sujets, construisez votre petit royaume quelque part, et faites-leur la guerre. Ce serait bien plus efficace qu’un traité de paix. Le roi des singes se contenterait probablement de le manger, de toute façon, dit-il, lâchant un rire léger. »

Ace imagine bien une petite bande de chevaux chargeant l’armée impossible de singes déchaînés. L’image est sympathique, et plus jeune il aurait probablement lancé l’initiative lui-même par manque de jugeote et un trop plein d’insouciance quant à sa propre survie.