Will you buy me a house of gold? - Fifa

Will you buy me a house of gold?
ft. Fifa

Son galop résonnait dans les sous bois qu’elle quittait. La jument accéléra, poussant sur ses jambes pour partir, partir loin toujours plus loin de cette rivière aux odeurs nauséabondes. Ces dernières semaines avaient été mouvementées pour la jument, allant de rencontres en rencontres, toutes plus douées pour l’ébranler les unes que les autres. Sa rencontre avec Fifa restait la plus marquante dans son esprit, celle qui avait bien failli tout faire s’effondrer. Cyrius laissait lui aussi une trace dans sa mémoire, semant l’espoir. L’espoir d’être quelqu’un, quelqu’un d’autre que simplement ce que son nom disait d’elle. Mais toujours, à quoi qu’elle pense, son passé et Fifa reprenaient le dessus. La tristesse d’être autre chose que ce qu’on voulait qu’elle soit, la déception d’avoir eu un avenir si grand, trop grand pour ses épaules. Et Fifa. Fifa, si vraie, si pleine de contenance, Fifa. Simplement Fifa, cette âme de leader, pleine d’une vérité brute et déconcertante. Fifa. Juste Fifa.

Ces deux syllabes suffisaient à ébranler Superbia. Elle ne serait jamais aussi véritable, jamais vraiment réelle, jamais elle-même. Elle ne savait que jouer, porter le masque, mentir. Alors elle mentait. Autant aux autres qu’à son reflet, pour un jour, peut être, passer de l’autre côté du miroir. Son galop ralentissait alors que les arbres laissaient place à l’herbe à perte de vue. Le ciel bleu azur irradiait sa robe dorée. Elle s’arrêta au centre de la plaine, tête tournée vers le ciel, pleine d’espoir qu’un jour, peut être, elle saurait être elle-même.

Le Coin des Tourterelles était paisible en cette journée d'été et Fifa se prélassait à l'orée des bois, profitant de l'ombre qu'offraient les arbres. Son ventre s'était dramatiquement arrondi depuis son dernier passage dans les environs et elle envisageait de se rendre à la Rivière de la Vie sans tout à fait en avoir envie. Une autre idée germait dans son esprit et elle la considérait chaque jour un peu plus. Et si... non, c'était trop dangereux.

Elle soupira et baissa la tête pour arracher quelques brins d'herbe juteuse. Un peu de mouvement la coupa cependant dans son élan et elle faillit redresser la tête pour regarder autour d'elle avec méfiance quand elle réalisa que cela venait d'elle. Ses yeux bleus dérivèrent sur ses flancs et elle sursauta lorsque le mouvement se répéta. Le poulain bougeait !

Surprise -et émerveillée-, elle même cessa tout à fait de bouger tandis que son enfant gigotait, n'ayant absolument pas conscience de la position comique dans laquelle elle était restée. Ses naseaux, encore à quelques centimètres de la touffe d'herbe qu'elle avait voulu manger, la chatouillèrent soudain et elle éternua bruyamment tandis qu'une brise tiède caressait ses flancs.

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ft. Fifa

Son souffle ralenti petit à petit, son regard perdue dans le ciel d’un bleu si pur qu’il lui brûlait d’aller le visiter. Partir loin, partir si loin et ne jamais revenir, aller là où personne ne pourrait jamais, Ô grand jamais, la détruire. Elle pouvait fuir autant qu’elle le voulait, éviter les autres pour essayer de se reconstruire, elle savait, au fond d’elle, qu’elle était celle qui se déconstruisait elle-même. Son regard perdu dans les plaines du ciel, elle ne remarqua pas le léger mouvement non loin d’elle. Plongée dans ses songes et ses pensées, elle se laissa aller à rêver une vie qu’elle n’aurait probablement jamais.

Un éternuement bruyant la fit sursauter et le retour à la réalité fût brutal. Son regard se porta sur les herbes qui semblaient abriter un équidé caché. Le vent lui porta une odeur de jument, et son coeur ratta presque un battement alors qu’elle pensait reconnaître l’odeur de Fifa. Elle n’en n’était pas certaine, mais quelque chose au fond d’elle s’agitait pour la prévenir. Sa tête refusa d’écouter cette petite voix et elle avança à travers les herbes, faisant un arc de cercle assez important jusqu’à rejoindre les traces du passage de Fifa. Les herbes couchées permirent aux deux juments de se voir assez distinctement, et Superbia redressa légèrement l’encolure, sur la défensive en reconnaissant la jument allongée là.

Pourtant, l’espagnole remarqua rapidement que Fifa n’était pas tout à fait la Fifa qu’elle connaissait. Son ventre s’était bien arrondi et, en étant attentive, la dorée pouvait voir que ses flancs ne remuaient pas qu’à cause de la respiration. Un être grandissait en elle. Fifa serait bientôt mère.

Le ciel bleu pesait sur la plaine et les rayons du soleil s'y égaraient sans jamais l'atteindre. Fifa s'en portait bien mieux ainsi, échappait à la chaleur grâce à l'ombre que dispensaient les arbres derrière elle. Un poulain d'été, voilà qui convenait bien au petit-être qui avait cessé de bouger dans son ventre. Elle soupira et arracha enfin la touffe d'herbe qu'elle avait délaissée, grimaçant lorsqu'elle réalisa qu'elle l'avait arrosée de bave. Tant pis, elle aurait bavé dans tous les cas.

La crème se coucha peu après, dissimulée dans les herbes hautes. Son passage en avait couché certaines et elle vit bientôt un équidé qui empruntait le même chemin qu'elle un peu avant. La robe brune de la jument et ses crins argenté lui évoquèrent des sentiments contradictoires qui la firent grimacer dans tous les cas. Ce n'était pas Pearlescence, la nouvelle arrivante était trop imposante pour ça mais quitte à choisir, elle aurait préféré sa nièce plutôt que Superbia...

« Superbia, salua-t-elle finalement. »

L'autre jument redressait déjà l'encolure et Fifa voulu se relever pour ne pas rester en position d'infériorité. Malgré la précipitation, elle réalisa en rassemblant ses postérieurs sous elle qu'elle ne parviendrait pas à se lever et cessa de bouger, crispée. Elle ne voulait pas risquer sa gestation, son si précieux enfant... Abattue, elle se laissa glisser dans l'herbe. Si elle s'apaisait elle pourrait se relever, tenta-t-elle de se raisonner. Prudemment, calmement... mais ses muscles étaient tendus et elle nerveuse.

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Alors que le soleil irradiait sa robe dorée, dardant ses rayons et réchauffant son corps, Superbia espérait sincèrement que personne jamais, ne pourrait entendre ce qu’il se passait dans sa tête. Elle peinait à garder son masque et son calme, la simple vue de Fifa lui rappelant à quel point l’autre jument pouvait tout détruire et tout embraser comme des fétus de paille. C’était l’apocalypse dans son esprit. Un ras de marrée, une tornade, toutes les catastrophes naturelles qui pouvaient exister. Fifa, la personne qu’elle voulait le moins voir au monde en cet instant où elle était si fragile, se tenait allongée là, devant elle. Malgré tout, l’espagnole reprit son calme intérieur et sa tête s’abaissa légèrement, comme si elle abaissait un peu ses défenses. Son pouls ralentit et son masque reprit du poil de la bête. Elle darda son regard un peu vide sur la jument, l'observant simplement.

Ses oreilles se dressèrent vers la plus claire lorsque celle-ci dit son nom, et Superbia fit un pas en avant en tendant l’encolure, tête vers Fifa. La jument semblait vouloir se lever mais en même temps, tiraillée par quelque chose que Superbia ne pouvait deviner. La nervosité de la future mère était palpable, et Superbia sentit bien vite qu’elle en était la source. Elle recula de deux pas, s’en voulant soudainement. N’était-elle bonne qu’à faire le mal autour d’elle?

Finalement, la plus foncée décida de s’allonger à son tour. De toute façon, elle n’avait pas d’autre solutions pour essayer de calmer la plus claire, si ce n’était de partir. Mais partir c’était avouer ses faiblesses et elle n’était pas encore prête à le faire, certainement pas devant Fifa. L’espagnole plia donc les antérieurs et se laissa choir dans les herbes, ramenant ses jambes sous elle, encolure arquée.

C'est pour bientôt?

Fifa se sentait parfois capable de soulever des montagnes. Ce jour là cependant, elle peinait à se lever elle-même et dardait sur Superbia un regard orageux. Le bleu de ses yeux se faisait de plus en plus glacé tandis qu'elle mesurait la situation. Superbia baissa la tête, assez subtilement pour que Fifa manque de l'ignorer mais toute son attention était focalisée sur sa rivale et elle battit des cils, une fois, en se demandant ce que cela signifiait. L'autre jument ne semblait jamais tout à fait mettre les sabots dans la confrontation, quand bien-même elle avait la carrure pour le faire et se défaire de ses adversaires.

Une faiblesse de caractère, peut-être, mais son pas en arrière témoignait d'une sensibilité qu'elle n'attendait pas de Superbia et Fifa la contempla pensivement, les lèvres serrées. L'autre jument était destinée à la surprendre à chaque fois, semblait-il. Elle se coucha non loin d'elle et la crème la regarda faire sans un mot, intriguée. Pourquoi ne passait-elle pas son chemin ? Pourquoi se montrait-elle aussi peu menaçante que possible ?

« Encore quelques mois, ce sera un poulain d'été, répondit-elle presque timidement. »

Son regard se réchauffa quelque peu tandis qu'elle observait l'autre équidé. Elle n'avait pas changé, ou trop peu pour qu'elle le remarque.

« Tu cherches à faire des rencontres ? demanda-t-elle avec une pointe de malice. »

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Une fois allongée ainsi dans les herbes, à la hauteur de Fifa, il sembla que cette dernière se détendait un peu. Superbia s’en rassura, contente que la tension entre elles baisse. Ses quelques années en troupeau lui avaient apprit que le stresse n’était pas l’allié des futures mères, elle avait du trop souvent consoler des juments ayant perdu leurs petits par la faute de dominants trop exigeants. Ses souvenirs l’envahirent et elle faillit se laisser aller à la nostalgie de ces jours où on voyait en elle une libération plus qu’une menace. Ces jours ou il y avait bien plus à craindre qu’elle. Même si les créatures démoniaques qu’on lui dépeignait étaient ses parents.

Fifa lui répondit avec une sorte d’hésitation que l’espagnole ne lui connaissait pas. Ou peut être ne pouvait-elle pas associer cet aspect à Fifa, elle qui la grandissait certainement et lui décuplait toutes ses qualités, rongée par une jalousie provoquée par le manque de confiance en soit. Fifa serait mère, et, au fond d’elle, Superbia était certaine qu’elle en ferait une bonne. Elle ne pouvait voir Fifa échouer, ça ne collait pas avec l’image qu’elle avait d’elle. Le regard de la dorée s’adoucit, un poulain d’été. C’était une jolie formulation et elle se demanda à quoi pourrait bien ressembler ce fameux bébé. Et qui était le père? Ce poulain avait l’air désiré, et elle ne pu s’empêcher d’être malgré tout heureuse pour Fifa, toute rivalité qu’elles avaient, la plus foncée n’en n’avait pas moins un coeur qui fondait à l’idée que l’amour de quelqu’un ait pu se concrétiser en une descendance.

Ce sera bientôt fini. Je te souhaite que ce ne soit pas trop douloureux.

Superbia ne pu empêcher son masque de glisser un instant alors qu’un sourire chaleureux habillait ses lèvres. Les souvenirs du bonheur des juments après mise bas remontaient dans son esprit. Tout le monde méritait le bonheur, n’est-ce pas? Son sourire s’effaça doucement alors qu’elle se rendait compte de la faille dans son mensonge. L’espagnole détourna la tête pour arracher une touffe d’herbe, essayant de reprendre contenance. La question qui suivit la surprit néanmoins. Chercher à faire des rencontres? En réalité c’était tout l’inverse. Elle aurait voulu être seule, rester seule, rebâtir et retaper son beau mensonge et sa carapace.

Non, en réalité j’aurais espéré pouvoir être un peu seule. elle fit une pause et reposa son regard sur la future mère. Mais, néanmoins, savoir que tu vas être mère est une bonne raison de quitter la solitude. C’est un poulain d’amour?

Elle se tut soudain, même si des milliers d’autres questions lui brûlaient les lèvres.

Contrairement à la première fois, la conversation avec Superbia se faisait sans accroc. En quelques échanges délicats, elles contredisaient l'animosité qui avait caractérisé leur première rencontre. Il n'y avait pourtant pas grand chose de différent, si ce n'était qu'il ne s'agissait pas de la même plaine. Elles étaient, encore, toutes les deux plantées en plein milieu du chemin et Fifa sourit en se souvenant de la joute verbale qu'elle avait traîné avec elle pendant quelques temps. Elle, avoir des grosses fesses ? Eh bien, elle en était fière, la plupart du temps.
Ce n'était pas son compagnon qui s'en plaignait, ce qu'elle fit savoir à l'autre jument.

« Mes grosses fesses n'ont pas rebuté mon compagnon. oops

»

Elle se mordit la lèvre pour retenir un sourire et pencha doucement la tête lorsque Superbia lui souhaita, pour ainsi dire, le meilleur. Son interlocutrice ne ressemblait plus à une poupée de cire et pendant quelques brèves secondes, elle partagea avec elle un peu de chaleur.

« Il n'y a pas de raison, je suis en bonne santé et nous n'avons pas d'antécédents dans la famillle donc ça devrait aller. Même ma nièce, qui est née prématurée, a pu donner naissance à deux poulains sans aucune complication. »

L'information était facile à donner, sans implication et elle ajouta comme une arrière pensée.

« Pearlescence te ressemble un peu, beaucoup plus frêle bien sûr. »

Il resta non-dit que cela n'avait pas aidé lors de leur première rencontre. La suite réveilla cependant toute l'animosité qui s'était endormie sous le soleil d'été et Fifa redressa brusquement la tête, outrée. Une étincelle de colère scintilla dans ses prunelles tandis qu'elle repliait un antérieur et tapait vivement dans l'herbe comme pour appuyer ses propos.

« Bien sûr ! Qu'est-ce que tu crois ? On est pas chez les sauvages ici et si un étalon essaye de te forcer à faire quoi que ce soit tu es en droit de te défendre ! Tu ne vas quand même pas te laisser faire... J'y crois pas ! »

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Superbia était repartie dans ses souvenirs. Elle se revoyait observer les poulains du troupeau, veiller sur eux. Elle se revoyait combattre des pumas pour les en sauver, éloigner son père pour ne pas qu’il leur fasse de mal sous le coup de la colère. Elle s’y revoyait, mais jamais l’idée d’être elle-même mère ne lui effleura l’esprit. C’était un concept qu’elle n’imaginait pas se calquer, jamais. Trop méfiante tout le temps, trop fausse, une simple poupée, un masque, pour toujours les repousser. L’amour était un concept abstrait pour elle, elle qui n’a jamais été choyée que pour rendre fier ses parents, elle qui n’avait eut d’amour que celui que l’on donne lorsque l’on veut quelque chose en retour.

Fifa la ramena à la réalité en faisant allusion à leur première rencontre. Un faible sourire étira les lèvres de la dorée alors qu’elle arrachait une autre touffe d’herbe pour la manger. Fifa ne semblait pas lui tenir trop rigueur des choses dites ce jour là. On ne pouvait pas dire que Superbia s’en était vraiment remise, quant à elle. La jument laissa légèrement tomber le masque, fatiguée de mentir et d’épuiser ses faibles forces dans une défense risible et inutile. Fifa ne lui sauterait pas à la gorge, n’est-ce pas? Elle tenait trop à son poulain pour se battre. Peut être que l’espagnole pourrait se reposer un peu. Juste un peu.

La suite des paroles de Fifa rassurèrent un peu la jument quant à l’issue positive de cette grande aventure qu’était la maternité. Elle ne risquait pas d’apprendre que Fifa était morte en couche, de la bouche d’elle ne savait quel inconnu. Et sans qu’elle ne sache pourquoi, ça la rassurait quelque peu. La plus claire mentionna une certaine Pearlescence qui lui ressemblait. Sa nièce prématurée, d’après ses dirs. Superbia releva la tête et la regarda un instant, ne sachant comment prendre cette information.

Tu l’apprécies, ta nièce? Ou est-elle comme moi à ce point là?

Son regard se voila légèrement et elle se remit à brouter un peu, ses épaules s’affaissant sous la fatigue. A force de toujours se battre contre elle même, elle s’essoufflait. Peu à peu, elle se noyait par sa propre faute, dans les profondeurs abyssales de ses peurs. Fifa tapa du sabot et Superbia se réveilla d’un coup, sur ses gardes, comme un animal sauvage apeuré, à l’affut du moindre geste brusque. Elle lui fit une espèce de morale pour qu’elle ne se laisse pas faire par le premier venu, et l’espagnole sourit doucement. C’était certain que personne ne l’aurait. Elle finirait peut être par mourir avant d’avoir assez confiance pour se laisser faire.

Personne ne me forcera à quoi que ce soit. Je me battrai jusqu’à la mort s’il le faut.

Son regard contenait autant de détermination que de fatigue, comme si la mort était plus une issue qu’une fatalité.

La poupée qui lui faisait face, comme posée sur un lit d'herbe en guise de cadre bucolique, ne semblait pas pouvoir cesser de sourire. Malgré l'éclat de voix qu'elle avait tiré à Fifa, Superbia ne s'offusquait pas et la crème la dévisagea avec méfiance. Comment faisait-elle pour garder son calme ? Elle rêvait de pouvoir se lever, piétiner... mais elle était trop agacée pour le faire prudemment.

Les épaules de l'autre jument tombaient comme son animosité et elle se montrait curieuse d'un sujet qui désintéressait la plupart du temps Fifa. Elle considéra cependant la question, parce qu'elle n'avait jamais pris le temps de comparer Pearlescence à qui que ce soit. Elle ne la détestait pas, ne la prenait pas non plus en pitié...

« Oh, vous êtes très différentes. Simplement un petit rappel de couleur. elle fit un signe de tête pour désigner Superbia et sa robe atypique. C'est la fille de ma demi-soeur dont je n'ai jamais été proche et elle a cet état d'esprit défaitiste qui m'insupporte... Ma mère a veillé sur elle toute sa vie et même adulte Pearlescence dépendait encore d'elle. Je ne vais pas mentir, elle n'avait pas grand chose pour elle mais elle se complaisait dans ses complexes et ne cherchait pas à s'en débarrasser. »

Elle soupira et détailla son interlocutrice pendant de longues secondes. Elles partageaient peut-être une certaine disposition d'esprit aussi mais les deux juments étaient fondamentalement différentes et elle ne ferait pas l'erreur de les confondre. Fifa repensa à la réaction presque apeurée de Superbia, ses paroles assurées. Assurément, l'autre jument avait plus de caractère que sa nièce et c'était bien pour ça qu'elle se sentait quelque peu inférieure, pour ne pas dire qu'une certaine rivalité s'était installée entre elles depuis leur première rencontre. Elle ne le dirait certainement pas, en effet.

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Superbia s’occupa l’esprit à brouter, essayant depuis plusieurs minutes d’ériger de nouveau ses barrières qui n’avaient de cesse de s’effondrer, la fatigue l’emportant sur la raison. Elle ne pouvait plus lutter autant qu’elle le voulait, et offrait au jour son esprit fatigué et son âme meurtrie. Ses yeux s’habillaient d’une profonde tristesse, de beaucoup d’insécurités alors qu’elle tentait vainement de les cacher à la vue de Fifa. Elle aurait voulu paraître forte. Ne surtout pas offrire la nuque à sa rivale. Ne surtout pas lui montrer qu’elle avait des faiblesses bien trop présentes, ne pas avouer à quel point elle était vide. Mais elle était faible en cet instant, et l’espagnole se laissa aller à la fatigue. Elle posa sa tête sur son flanc et ferma les yeux, ses oreilles remuant au rythme des paroles de la plus claire.

Superbia mit quelques secondes à répondre, autant par la fatigue que par son aspect démuni face aux paroles de l’autre jument.

Il est parfois difficile de surmonter les démons qui nous rongent de l’intérieur. N’en n’as-tu pas?

Elle doutait que la réponse à sa question soit positive. Fifa ne pouvait simplement pas être aussi tirraillée que ça, c’était un concept que Superbia refusait d’imaginer. Elle la mettait tellement en valeur, sur un piédestal en métal précieux, qu’elle était incapable de voir que, comme tout le monde, Fifa pouvait elle aussi être sujette à la peur. La jalousie n’aidant pas, Superbia aspirait à devenir comme la plus claire. Elle espérait en être capable, du moins, avant de sombrer complètement.

Superbia avait l'air fatiguée et Fifa se demanda bien ce qui pouvait l'exténuer à ce point. Elle n'avait pas de responsabilités, pas d'enfant à porter et ne portait pas non plus les signes d'un combat. Une grimace tordit son visage pâle et elle ne tenta pas de la cacher. Que l'autre jument l'ait remarqué ou pas, elle s'en fichait. La question de son interlocutrice était un peu trop intime pour qu'elle ait envie de lui répondre et pourtant, elle cracha avec hargne.

« J'en ai, comme tout le monde, mais je ne le fais pas sentir à chaque rencontre. »

L'agacement l'avait étrangement calmée et lorsqu'elle s'efforça de se relever elle y parvint sans difficulté. Bien sûr qu'elle était rongée de l'intérieur, l'avait longtemps été et le serait probablement encore. Elle ne faisait cependant pas porter ce poids à des inconnus, osait à peine le partager avec ses proches. Jamais elle ne le ferait peser sur Kokoï...

« On peut choisir de les laisser nous dévorer ou lutter et essayer de les repousser, son regard se fit distant mais sa voix n'avait rien perdu de sa force. »

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Son combat intérieur avait épuisé Superbia au point que ses paupières s'étaient fermées. À la merci de Fifa, et certainement de quiconque passerait par là, l'espagnole ne s'inquiéta pas plus que cela de sa vulnérabilité. Fatiguée, elle baissait peu à peu les bras face à tout ce pour quoi elle avait combattu depuis toutes ces années. Après tout, peut être ne valait-elle pas le coup de faire tous les efforts qu'elle faisait depuis toujours. Les mots de son père et de sa mère raisonnaient à ses oreilles, plus froids et plus blessants chaque jour. Où qu'elle allait, elle ne trouvait pas d'amour, pas de chaleur, seulement des murs invisibles auxquels elle se heurtait.

Peut être était-elle la source de sa propre solitude, peut-être érigeait-elle elle-même ces barrières invisibles qui la dévoraient de l'intérieur. Mais elle n'était pas prête à s'abandonner à l'inconnu. Elle ne le serait peut-être jamais.

Le ton de Fifa se fit hargneux, comme si Superbia avait dit une bêtise. Elle se revoyait soudain pouliche face à ses parents furieux, à deux sabots de lui coller une raclée qu'ils pensaient méritée. Elle se senti soudain faible et frèle, grelottant dans un froid imaginaire. Sa peau fut parcourue de frissons alors qu'elle rouvrait les yeux pour regarder la future mère qui se levait, mue d'une force nouvelle, certainement générée par la haine qu'elle portait à la dunalino.

Superbia ne répondit pas, à aucun moment. Elle resta muette, presque roulée en boule dans les hautes herbes, la tête légèrement redressée, l'encolure fatiguée. Elle observa la crème qui s'était levée et qui finissait de parler, comme si elle attendait une autre leçon. Ou des coups. Peut-être était-elle finalement prête à mourir sous les sabots de Fifa, finalement.

Enfin?

Fifa adressa à Superbia un regard dédaigneux. L'autre n'avait décidément aucun feu et s'éteignait bien trop vite pour la crème qui soupira lourdement, détourna la tête et s'éloigna sans un regard de plus pour la jument. Il n'y avait rien à voir si ce n'était une publicité mensongère dont elle grattait la peinture un peu plus chaque jour sans rien trouver d'autre que le revêtement brut d'un panneau publicitaire. Un jour peut-être, elle creuserait assez pour y voir quelque chose qui ne lui donnerait pas l'impression d'avoir perdu son temps.

FIN.

Hors RP:

» A House Divided
» Delirious | Fifa
» Gadoue [pv — Fifa]
» We waited for you | Fifa & Everybody
» There's no hiding for me ; ft. Kokoï & Fifa